Je me doutais un peu que ma lettre ouverte au Devoir, dans laquelle je dénonçais le jeunisme du patron des Francos Laurent Saulnier, allait créer quelques remous, mais je ne croyais pas qu’on en était encore à tirer sur le messager!
Que ça réagirait par attaques personnelles, par clans.
Ceux qui aiment les chansonniers (ou qui en sont eux-mêmes) d’un bord, les amateurs de pop contemporaine de l’autre. Désolé à tous, mais j’aime autant un vieux chansonnier de 65 ans que Philippe B ou Étienne Daho. Il y a même des disques (un, en fait) d’Isabelle Boulay que je trouve meilleur que d’autres d’Allain Leprest, le Grand Génie Méconnu vénéré par des tas de confrères et dévots du Texte.
J’ai une passion énorme pour la chanson française, et elle s’étend des chansons du Moyen âge jusqu’à des chanteurs québécois tellement méconnus que même leur famille ne doit plus les connaître.
Je voudrais juste répondre en vrac à mes détracteurs:
-non je ne suis pas Français
-j’ai 38 ans
-je n’ai pas été bercé dans mon enfance par Jacques Brel, j’aime ce type de chansons-là pour d’autres raisons que la nostalgie
-j’apprécie beaucoup de choses aux Francofolies, j’y cours chaque année
-je ne suis pas contre les nouveaux chanteurs, ni la nouvelle chanson (mes deux albums de l’année pour le moment c’est Sylvie Paquette et Albin de la Simone)
Le propos de mon billet était juste de dénoncer que les Francofolies de Montréal ne donnent plus de scène à un courant important de la chanson. C’est tout. Je ne veux pas qu’on arrête de produire des nouveaux chanteurs, juste un équilibre. Saulnier programme des gens de la Star Académie, des hip popeurs, des musiciens du monde qui chantent plus ou moins en français? Bon… Mais pourquoi ignorer les chansonniers?
J’ai vu qu’André Péloquin, chef de la section musique du Voir (n’est-ce pas lui qui a interviewé Saulnier la semaine passée?) me consacrait (quel honneur!) une lettre ouverte sur le site de l’heddo. On peut la lire ici. J’y ai répondu:
Bonjour André,
On va se tutoyer puisqu’on a foulé le même plancher du Voir à Montréal, à des époques bien différentes… Quand je suis arrivé, fin 2004, le rédac chef, les chefs des sections musique et littéraire (tous partis depuis) étaient ravis car la chanson française au Voir, ça faisait dur. J’ai essayé de relever le niveau pendant plus de six ans, et te voilà aujourd’hui, à critiquer Alex Beupain sans comprendre qu’Avant le déluge, le titre de son nouvel opus (très mauvais, par ailleurs), est à prendre de manière ironique, mais enfin…
Ton message est apparu pour la section commentaires de mon blogue, je ne sais pas trop pourquoi. Mais j’y réponds ici!
Je ne veux pas m’attarder sur ton cas, ni sur l’état actuel de ton journal (déjà quand j’y étais, les gens ne le lisaient plus, dégoûtés de sa mauvaise qualité, qu’est-ce qu’ils doivent dire aujourd’hui! à part Manon Dumais et Elsa Pépin, ça ne vole pas haut!)…
Il faut juste que tu saches une chose, André. C’est important. Si tu confonds «chansonniers» et Daniel Lavoie, tu as un sacré problème de culture musicale. Ceux qui pratiquent cet art plusieurs fois centenaire (ça remonte aux trouvères, au Moyen Âge!), ceux qui les écoutent encore (et pas tous des vieux de 38 ans comme moi!), ceux-là savent qu’il y a un monde entre Daniel Lavoie et les chansonniers.
De plus, en tant que chef dans Voir, tu devrais avoir une vue d’ensemble et t’apercevoir que les hommages que l’on présente aux Francos (Brel, Félix, etc.), que les ancêtres comme Charlebois, Lama ou Gréco, on les invite pour capitaliser sur la nostalgie. Pas par respect des aînés.
Et enfin, si tu penses qu’il suffit d’inviter des chanteurs à cheveux blancs pour respecter une culture, il te faudra changer de boulot.
Je suis surpris, à la lecture de ta lettre ouverte, que tu ne m’aies pas reproché – comme d’autres sur la toile – d’être moi-même un vieux, d’être Français (oh, la honte, venir de France, se promener avec une baguette sous le bras en permanence). Tu ne me reproches pas de ne pas connaître Philippe B ou Les soeurs Boulay, de vivre dans le passé?
Sur ce point, je vois que tu as bien fait tes devoirs de recherche avant de rédiger ta lettre. Bravo. Laurent Saulnier sera content. Si t’es vraiment gentil, peut-être même qu’il t’offrira une bière.