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Fioritudes, un salut audacieux

29 janvier 2016

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Il fallait l’oser, et ils l’ont fait, peut-être guidés par la mise en scène de Luc Picard: un spectacle hommage à l’oeuvre de Serge Fiori, sans inclure plusieurs éternels classiques d’Harmonium: ici, rien du premier 33 tours, et pas même Dixie!

Ça s’appelle joliment Fioritudes, ça tourne actuellement au Québec, et ça salue d’abord et avant tout le dernier disque de Serge Fiori (2014), joué entièrement et dans l’ordre en deuxième partie de soirée. Étant donné le succès critique et public qu’il a reçu, et puisque son créateur ne peut actuellement remonter sur scène pour des raisons personnelles de santé, c’est une jeune génération d’artistes qui s’y collent avec une fougue réjouissante. Seul Daniel Lavoie ne cadre pas avec l’esprit de fête et d’humilité partagé par tous les autres, musiciens compris. On le préfère de loin chez Miron ou chez Leprest.

Qu’on aime ou non les chansons choisies, on applaudit l’enthousiasme des Antoine Gratton et Alexandre Désilets. Ce dernier a d’ailleurs une voix haut perchée assez similaire à celle de  Fiori, c’en est troublant.

Il y certains moments très forts dans ce spectacle que l’on voudrait retrouver sur disque. Catherine Major est majestueuse, émotion majeure, toute en retenue et en puissance. Tour de chant, tour de force. Partout, elle étincelle. Lorsque Ian Kelly arrive sur scène avec sa guitare acoustique pour nous chanter de manière dépouillée Laisse-moi partir, on est stupéfait. La suite, un duo avec Lavoie sur la faiblarde Zéro à dix, est plus dispensable. Mais il faut que sa Laisse-moi partir soit gravée ailleurs que dans nos seules mémoires de spectateurs…

Et puis il y a la surprise. Pour cette représentation à Longueuil, Marie-Pierre Arthur avait un conflit d’horaire. On a demandé à l’anglo francophile Andrea Lindsay de la remplacer pour un soir. Oui, elle a bien avalé quelques mots, mais il faut dire que les chansons de Fiori ne sont pas faciles à interpréter même pour un francophone. Malgré cela, Lindsay a été bouleversante, spécialement dans Depuis l’automne, un monument qui continue à nous faire frissonner quatre décennies après sa création. On veut pouvoir réécouter ça!

Le vinyle «Fiori-Séguin» a aussi été à l’honneur, un album dont on ne se lasse pas. Trois chansons en ont été extraites: La moitié du monde; la festive Viens danser et Ça fait du bien. Une seule vient de «L’heptade»: Comme un fou. Pourquoi pas Le corridor par Catherine Major?

Un bémol cependant, était-ce un problème de salle, de haut-parleurs ou de calibrage? Dans les titres plus rythmés, on entendait très mal les paroles. Heureusement, on en savait plusieurs par coeur, depuis tellement longtemps…

Pour mémoire, rappelons à ceux qui voudraient également voir un hommage plus traditionnel mais tout aussi réjouissant à Harmonium, avec presque tous les classiques, on peut se tourner vers le groupe Premier Ciel, avec la bénédiction de Fiori lui-même. J’en avais fait la critique ici.

Maintenant, rêvons encore à une réédition soignée en cd des quatre albums d’Harmonium, le Fiori-Séguin ainsi qu’en suppléments des DVD d’archives. Pour souligner sa contribution essentielle au patrimoine musical mondial, fabriquons le coffret que Fiori mérite.