Archive for juin 2014

Salut, Renaud!

9 juin 2014

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Deux projets hommage à Renaud paraissent en parallèle ces jours-ci. Un officiel et un clandestin. Naturellement, la presse qui se veut branchée, les snobs et le public plus pointu feront une fête au confidentiel pour mieux mépriser l’autre. Un cd officiel, sur une grosse maison de disques? Pouah! On se pince les narines d’avance, des mois avant le méfait.

Et pourtant…

Mais d’abord précisons que pour des maniaques de chanson française dans mon genre, les versions originales de Renaud, Brassens, Gainsbourg ou Brel seront toujours supérieures aux reprises. Pour Ferré, ça se discute… Le modèle de refonte géniale reste Comme à Ostende par Arno (encore mieux dans la mouture en public). Ça surprend, ça prend aux tripes et ça apporte quelque chose de plus au classique de Caussimon/Ferré.

Commençons par le projet en marge, qui est apparu sur la toile juste avant l’autre. Intitulé Tatatssin (comme le livre de l’auteur Baptiste Vignol, qui en parle ici), il s’agit d’un site Internet qui regroupe une vingtaine de vidéos Youtube. Premier problème: pour écouter l’ensemble, il faut cliquer sur chacune d’elles, une après l’autre, je n’ai pas vu de liste de lecture qui permettrait une écoute suivie. Pénible processus. Deuxièmement, il aurait été trop simple pour les concepteurs de l’ombre de publier clairement le nom des interprètes choisis. Non! Vous pensez bien! C’est banal! Nous, on est original. On met le nom de l’interprète à la toute fin des vidéos Youtube, comme un générique! Probablement pour ne pas déconcentrer l’auditeur, et c’est l’inverse qui se produit… Parmi les interprètes, on trouve plusieurs artistes que j’aime: La Grande Sophie, Ludéal, Louis-Ronan Choisy, Pierre Schott (pour une version reggae de Tant qu’il y aura dans l’ombre qui laisse perplexe). Ils font un travail honnête, mais qui sent quand même l’exercice de style: peu d’émotion passe là. Oublions rapidement la lourdingue relecture de En cloque (par Peter Kröner) ainsi que les gens qui nous infligent du Renaud en hip hop, sans doute dans le pénible but de le remettre à la page. La seule reprise qui force l’admiration est celle de Je m’appelle Galilée par l’inconnue Circé Deslandes, mais on aurait voulu qu’elle ne supprime pas des couplets au passage… Trois couplets, si j’ai bien compté… Pour un poème d’un poète, la retaille peut être nécessaire, mais pour un texte de chanson déjà existante, c’est inadmissible. Une exception à la règle: on a beaucoup apprécié le passage modifié (et très drôle) dans Ma gonzesse. Chapeau à Geoffroy 1er. Si vous avez la patience de cliquer une quarantaine de fois sur votre souris pour entendre ce projet, c’est à cette adresse.

Maintenant, la vilaine grosse maison (à but commercial, re-pouah!) qui met sur le marché un cd ou 33 tours (oh, les ringards, un disque à l’ère numérique!): «La bande à Renaud». Joli titre, jolie pochette.  Et des artistes parfois plus populaires, certes, mais talentueux: Thiéfaine, Raphaël, Biolay, Carla Bruni, Bénabar, Grand Corps Malade, Nicola Sirkis d’Indochine, Nolwenn Leroy, Renan Luce, Jean-Louis Aubert ou Élodie Frégé. On est même allé chercher Benoît Dorémus, dont Renaud avait déjà repris la magnifique Rien à te mettre. Globalement, ils s’en sortent plutôt bien. Mais ils ont eu la mauvaise idée d’inviter le hip hopeur (?) Disiz qui saccage Laisse béton.  La surprise de l’opus? C’est la normalement imbuvable Coeur de pirate, qui réussit à émouvoir avec Mistral gagnant, comme l’avait déjà fait jadis Vanessa Paradis… On me chuchote à l’oreille qu’il pourrait y avoir un volume 2 de «La bande à Renaud», si le succès était au rendez-vous.

Amateur du «chanteur énervant» depuis bientôt un quart de siècle, je souhaite que ses chansons continuent à se propager, de préférence par lui-même, mais sinon grâce à ce type de projets. Et surtout, on peut souhaiter que Renaud se relève de ses galères et se remette à écrire: des chansons, des chroniques, des livres. Car pour paraphraser une préface de Philippe Val dans le jouissif recueil «Bille en tête»: dès qu’il écrit, ça chante.

Ma petite collection Renaud voudrait s’enrichir encore longtemps…

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