La semaine dernière, le quotidien Le Devoir prouvait encore une fois son mépris de la chanson française en publiant un article de Sylvain Cormier sur Anne Sylvestre. Dans son texte, le chroniqueur de variétés, grand amateur de Beatles et de Beach Boys, avouait ne pas connaître Sylvestre, jusqu’à tout récemment, pour préparer une entrevue avec elle. Quand on sait que la dame est une des plus grandes de toute l’histoire de la chanson, que ça fait plus de 50 ans qu’elle chante, il y a de quoi se poser des questions.
On se rappellera aussi que Cormier avait déjà avoué que, avant de faire de la critique chaque semaine dans l’émission de radio de Monique Giroux, il ne s’intéressait pas vraiment à la chanson française… Quand on sait toute l’affection que Giroux a pour les chanteurs d’outre-Atlantique, on peut se demander pourquoi c’est à Cormier qu’on a confié cette tâche essentielle. Pourtant, au Québec, on en trouve des journalistes amoureux de la chanson française. Je pourrais citer des noms. Au moins deux…
Je l’ai déjà mentionné ici, Sylvain Cormier est un des meilleurs journalistes culturels au Québec. Mais en chanson française, il n’a pas sa place. Qu’un journal soi-disant sérieux comme Le Devoir lui donne carte blanche ainsi laisse perplexe. Donnerait-on une rubrique littéraire à un journaliste qui n’aurait pas lu un minimum ses classiques? Une tribune sur le théâtre à un chroniqueur de jazz?
Ça rappelle quand Robert Lévesque, il y a 20 ans, déplorait qu’à l’émission de télé La bande des six, n’importe qui faisait de la critique d’une pièce sans être jamais allé au théâtre. C’est méprisant pour le théâtre, en concluait-il.
C’est la même chose pour la chanson. Ce n’est pas seulement Anne Sylvestre qui mérite mieux qu’un texte de Cormier, c’est tout l’art qu’elle pratique.
Pendant ce temps, on dévoile la programmation du festival Coup de coeur francophone. Ça ne cesse de décliner d’année en année. On ne prend même plus la peine d’inviter des artistes européens, ou si peu (Suarez et La Grande Sophie pour 2012). Quand on pense qu’on a déjà eu des Allain Leprest, Romain Didier, etc.
Ça fait peine à voir. Plusieurs artistes québécois de la programmation sont vraiment très bons, on est content pour eux que les journalistes étrangers ou des voyageurs puissent les découvrir ici. Mais le Coup de coeur ne s’adresse-t-il pas d’abord et avant tout au public québécois?
Et les amoureux québécois de la chanson, ce qu’ils sont en droit d’espérer d’un festival, c’est de la grande visite européenne, pas des gens qu’on peut voir tous les jours dans une salle près de chez nous.